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samedi 6 juin 2009

Le couvreur et ses couverts


La population faisant la ronde autour de la table du repas est constituée d'au moins quatre catégories de convives. La première a détourné ses fonctions physiologiques de base et consomme allègrement la salive que son cerveau lui ordonne de secréter à la vue du thon oeuf dur mayonnaise en parlant sans discontinuer, obligeant ses camarades d'assiette de faire de plus en plus de bruit avec ses couverts pour être épargnés des litres et des litres de paroles plus ou moins éthyliques (synonyme de saôulantes pour cette fois-ci, je reste dans le thème et ça fait plus technique). Blablabla en entrée pour les uns, blablabla au dessert pour les autres, aspirine et antivomitif au digestif pour tout le monde. La seconde maximise ses maxilaires. De véritables pelleteuses qui chargent copieusement leur godet fourchette et déversent dans une bouche ouverte au-delà des limites de l'élasticité humaine. Aucune pensée pour leur panse, pas de noeuds à l'estomac liés à la crainte de l'indigestion, ils enfournent. Sont-ils atrophiés du goût? Ou au contraire, auraient-ils développé des liaisons nerveuses si rapides qu'ils peuvent distinguer toutes les saveurs mélangées par leur voracité en moins de temps qu'il ne faut pour émincer un poireau? Bien évidemment, tout n'arrive pas à destination, ça glisse, ça coule, ça tombe sur les côtés, construisant de petits tas de part et d'autre de leur place. Leur livre de chevet: "Goutières et dégoûts", l'histoire d'un couvreur (Mr Garcia) goinfre aux mensurations pachydermiques dont la défense tenait dans la simple réflexion "l'altitude ça creuse", (ses ouvriers, quant à eux sentaient souvent la tuile arriver lorsque la bosse stomacale posait le pied sur leur terrain de jeu). Le bavoir doit être au format bâche et être équipé d'une gouttière (encore le couvreur) sinon, les enzymes gloutons frôlent l'indigestion dans le tambour de la machine à laver, homothétie du panier à salade en phase essorage. La troisième catégorie est en fait hors catégorie. Elle accueille ceux (oui car c'est assez masculin, vous le constaterez par vous même) qui pensent que manger la bouche ouverte est tout à fait naturel. Certains aliments sont naturellement bruyants à la mastication, c'est assez gênant. Nos bonshommes joignent l'image au son et n'ont nul besoin d'aliments croustillants et croquants pour émettre bruit de langue, lèvres et chicot. Ils engloutissent comme certains de leurs amis et dans un souci d'efficacité mastiquent en plein air. Je me demande si cette voracité n'est pas un signe d'anxiété et s'ils ne comptent pas sur leur vis-à-vis pour les tenir informés du moment propice à la prochaine charge, un passage à vide pouvant se révéler très acide. Qu'il est insupportable de manger dans pareille ambiance de claquement de mandibules. Que l'on scelle les mâchoires des mastiquateurs avec un bon mastic! Le rot est leur signe de raliement et à manger aussi vite, il est certain qu'ils se reconnaissent aussi après la digestion.... Tout ces travers de porc doivent être endurés par la quatrième catégorie qui trouve la note un peu salée. Leur repas dans le calme saupoudré d'une discussion posée s'éloigne. La large place à l'appel des sens, à la recherche des saveurs et au partage des impressions culinaires et non vestimentaires que ces gourmets aiment planifier dans leur journée est dévastée par le mangeur bruyant. Faudrait-il se qu'hacher pour manger heureux?

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